Le Voyage d’une pomme

pomme

La pomme a des milliers d’années d’histoire. En quelques minutes, nous vous présentons le Voyage d’une pomme.

Il était une fois… Alagu atugwakam…

La Chine

Dans les Montagnes Célestes de Chine, une petite pomme rouge et jaune qui vivait à l’état sauvage et qui voulait voir par-dessus les montagnes.

Partie de Xi’An, dans l’est, la petite pomme emprunte la route de la soie pour rejoindre l’ouest. Elle vit confortablement autour de la mer Méditerranée.

Chez les Grecs, les Romains, les Celtes puis les Gaulois

Les Grecs et les Romains pratiquent la greffe. L’homme d’état romain, Appius Claudius, donne son nom à la Pomme d’Api.

Au nord, les Celtes appellent la pomme : Ablu. Par sa corne d’abondance, la divinité Rosamerta protège Ablu. Lors des disettes, écrasée, mélangée à l’eau et à quelques grains, Ablu nourrit le peuple.

Leurs descendants, les Gaulois, appellent la pomme : Aballo. Ils considèrent le chêne et le pommier comme une plante magique, pourvoyeuse de rêve et d’évasion.

La déesse Pomona

Les Romains s’installent en Gaule. Les Gallo-romains vénèrent la déesse des fruits nommée: POMONA. Pomona déteste la nature sauvage. Elle préfère les jardins entretenus. Un ensemble d’arbres entretenus se nomme : POMARETU, pommeraie.

Le fruit de l’arbre entretenu : POMA, pomme.

Poma – Pume

Pendant 5 siècles, Poma se promène dans toute la Gaule. Deux langues romanes s’installent. Au sud, en langue d’Oc, Poma reste Poma. Au nord, en langue d’Oïl, Poma devient Pume.

Poma et Pume connaissent l’invasion des Francs. Charlemagne ordonne que chaque métairie ait son POMARIUM : un lieu où poussent différents arbres fruitiers, dont les pommiers.
Normandie
Puis la Pume grandit avec les Vikings appelés Hommes du Nord : Man du Nord. Les « Nor-mans » s’installent dans une région qui sera appelée Normandie, épousent les femmes du terroir et protègent la région des intrusions.

Aeppla lundr

Les Normands vénèrent la Pume et deviennent ses gardiens dans des : aeppla lundr. Apple. POMMES DANS L’ENCLOS. La Normandie devient riche de « aeppla lundr » où la Pume, protégée, vit à son aise.

Avec le latin, le pommier cultivé dans un enclos, dit domestiqué, est appelé : MALUS Domestica ou Malus Pumila. Malus gardera ce nom scientifique jusqu’à ce jour. En latin, la pomme est : MALUM.

La poume

François 1er ordonne que le Francoys soit la langue officielle en France mais, pendant des siècles, le patois régional demeure. En Normandie, la Pume s’appelle : POUME. L’arbre cultivé et entretenu dans un enclos se nomme : POUMYI.

On dit à cette époque en Normandie :

La Poume dan la seille senta boun.
La pomme dans le seau sent bon.

Il y a principalement deux sortes de poume :

La poume à coutiau (couteau), qu’on mange.
La poume à jus, qu’on boit.

Samuel de Champlain et Louis HébertLa Poume quitte la Normandie pour l’Acadie
Vers 1606, à Honfleur, Samuel de Champlain et Louis Hébert, apothicaire, embarquent la poume sur une roberge normande, Le Don de Dieu.

La Poume arrive en Nouvelle-France, à Port-Royal, où vivent le grand chef Membertou et son peuple Mi’kmaq.

Chez les Mi’kmaq, le mot pomme n’existe pas.

Wenuj est le nom donné aux français qui veut dire «chair blanche».

Usun veut dire «fruit».

Les Mi’kmaq donnent à la pomme le nom de WEN’JUSUN qui veut dire fruit des français.

Alors que Louis Hébert fait des expériences avec la Poume, auparavant, à l’aise en Normandie, la poume ne supporte pas les printemps tardifs et les automnes précoces à Port-Royal.

Un jour, avec la pomme on fera du cidre de glace mais, quand les colons débarquent en Nouvelle-France, la poume a du mal à survivre en Acadie.

La Fameuse

Des années plus tard, à Québec, Louis Hébert reprend ses expériences avec la Poume qui devient blanche à l’intérieur et sucrée. Elle est nommée par les colons la poume «FAMEUSE». Mais la Fameuse demeure fragile, sensible au gel.

Wenujj aq L’nu sa’se’wa’toq eltaieg.

Le troc se fait entre les colons et les amérindiens.

Le mariage

En Acadie, les colons présentent aux Mi’kmaq la Poume blanche et fragile en patois normand :
mikmak
La poume estre eun frit du poumyi.
La pomme est un fruit du pommier.

Mi’kmaq apsute’gan tsunemi megweg usun sismo aq melgeg.

À leur tour, les Mi’kmaq présentent aux colons de petits fruits rouges, amers et résistants.

La ressemblance est indéniable.

Les mots entre les humains s’échangent :

Poume blanche Wapeq wenujsun
Poume rouge Mekwe’k wen’jusun
Arbre à pomme Wen’jusun miti’s

Le poumyi aux fruits rouges résistants sera le pollinisateur du poumyi aux fruits fragiles à chaire blanche. On les marie. Le soir des noces…

La poume rouge dit en langue Mi’kmaq.

Etawet na wen’jusun
Je veux goûter comme le fruit français.

La poume blanche lui répond en langue d’oïl.

La Poume fé décarogaer.
La pomme te fait perdre la tête.

La poume blanche sucrée et la poume rouge résistante font des petits.

Rouges et forts comme leur père.
Mekwe’k aq melga’toq eta kuj.

Blancs et sucrés comme leur mère.
Wapeq aq wejooljak eta giju’.

Avec une couleur jaune qui perce leur peau.
Mest gesmapewit watapteq.

Leurs enfants sont des merveilles en Acadie.
Mijuajij gise’g amoojiang Acadie.

Leur descendance s’appellera : Délicieuse.

Les descendants arrivent à Montréal

En 1642, la Poume Fameuse, blanche, sucrée et résistante, et Paul de Maisonneuve sont à Montréal. Les habitants et les Jésuites font de nombreux vergers sur la montagne où la Poume Fameuse est reine.

Dès 1818, des pommiculteurs montréalais présentent la Fameuse du Canada, ou Pomme de Neige, ou Snow White dans les expositions horticoles en Angleterre.

Elle est appréciée par les anglais à un point tel qu’elle est expédiée par bateau dans des tonneaux jusqu’au début du 20e siècle.

La Poume se modernise. Elle prend le nom de POMME DU CANADA.

La pomme s’installe dans des fermes autour de Montréal. De nombreuses variétés voient le jour : à couteau, à jus. C’est la production.
Ferme de Laurenzo d’Amour 1976
Certains mettent en relief la pigmentation jaune de la pomme, d’où la Golden. D’autres recherchent le rouge, d’où la Melba. D’autres recherchent le vert avec une joue rouge, d’où la McIntosh. La McIntosh fait à son tour des petits, d’où la Lobo.

Plus près de nous

Le fermier, Laurenzo d’Amour, plante la pomme dans sa ferme à St-Antoine-Abbé. L’emplacement prend le nom de verger. Pour promener la pomme, le fermier utilise ce tracteur d’origine.

En 1976, Laurenzo d’Amour, vend sa ferme à Jean-Marcel Boucher. Le nouveau propriétaire restaure les bâtiments. La maison s’appelle Auberge. Le hangar devient le Restaurant Les Trois pommiers.
Village 1976

Quelle peuplade!

Soudain, la pomme voit débarquer sur le terrain une bizarre peuplade. Des tous nus. Du jamais vu. Sur le coup, elle ferme les yeux.

Puis ses yeux s’écarquillent. Et, comme le dos des tous nus, sa peau vire au rouge. Elle les accepte car…

En honneur de la pomme, la propriété est nommée :

La Pommerie – Centre écologique et naturiste.

La Pommerie

S’il y avait encore des Iroquois dans la région, ils auraient probablement nommé cette pommeraie : S8aioâ Hohonda. Le 8 n’est pas une erreur, mais une lettre exprimant le son OU.
Chez Dame Jeanne
On met les descendants de la Fameuse à l’honneur. Des secteurs portent le nom de Délicieuse, McIntosch, Lobo, Melba. Avec un goût de Cèdres, de Boisé et un soupçon de Clairière.

Puis des actionnaires modernisent les espaces.

Puis le propriétaire actuel diversifie et bonifie le site.

Le propriétaire tient à sa pomme. Il la traite. Il lui offre de la musique. Il s’entoure d’alliés qui parrainent les pommiers.

Bien-sûr, le combat peut être difficile entre lui et certains habitants, comme la mouche et le ver.

Mais la pomme, tenace et positive, préfère vivre avec les différentes forces des habitants : leurs talents, leurs amitiés.

Ainsi, après avoir fait 20 000 kilomètres et connu tant d’aventures, la petite pomme jaune et rouge, heureuse, s’installe pour rester.

Au terme de son voyage, la pomme dit à Gilles :

En français : Merci infiniment.
En langue d’oïl : Merchi byin des couops.
En langue mi’kmaw : We’lalin.

Il existe 6 langues iroquoises dont le Mohawk et l’Onondaga. Onondaga veut dire Peuple des Monts.

Gilles, dans la langue de ton ancêtre Onondaga qui s’appelait, Tsi’tenha, qui veut dire « oiseau », et qui a certainement vu des pommiers dans ce territoire iroquois sur lequel nous nous trouvons, la pomme te dit : «Niawen kó:wa hissoà» – «Merci beaucoup»